2 février 2008
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21:04
Mangez-moi, mangez-moi !
Nouvelle production de la fine équipe que forment Johnny Depp le décadent et Tim Burton le baroque : Sweeney Todd.
Edward aux mains d'argent reprend ses rasoirs pour se venger d'une infamie et camper le diabolique barbier de Fleet Street : celui qui égorge ses clients au premier tandis que la cuisinière du rez-de-chaussée prépare ses célèbres tourtes à la ... viande (meat pie en VO).
Comprenez bien : la viande est si rare et si chère à Londres en ce temps-là !
Tout cela est fidèlement adapté d'une comédie musicale de 1979 de Stephen Sondheim (l'auteur des chansons de West Side Story).
L'histoire est celle d'une nouvelle de 1846 de Thomas Peckett Prest reprenant des faits divers plus ou moins véridiques.
Tim Burton filme cette diabolique légende (elle inspira également Dickens) dans un Londres de bande dessinée, de carton-pâte, bref dans un décor de théâtre sombre et sépia, comme pour mieux faire « jaillir » ... le rouge.
Il nous offre également quelques beaux jeux de miroirs, de vitres et de reflets.
Car tout n'est que trouble apparence dans cette soi-disant comédie qui est bien autre chose qu'un spectacle gothique dont sont friands les grands ados d'aujourd'hui.
Au-delà des effets de cinéma, on notera par exemple la présence surprenante de Jayne Wisener, véritable clone de Vanessa Paradis : Vanessa Paradis n'est autre que la femme de Johnny Depp à la ville alors que dans le film, Jayne Wysener joue la fille du barbier. Reluquée par un vieux grigou amateur d'une chair trop fraiche et trop jeune, elle finira même déguisée en garçon, ...
Permettez également qu'on insiste un peu ici sur la thèse cannibalistique de cette « joyeuse » comédie macabre.
Car le propos est pour le moins explicite : Robin des Bois égorge les riches et puissants qui ont les moyens de se faire tailler la barbe et Marianne prépare ses meat pies pour nourrir les humbles gens.
Il y a quelques jours, on s'étonnait sur le blog de Noir et Bleu de lire le cannibalisme hanter l'imaginaire nippon (littérature, faits divers, dont d'ailleurs nos médias se font en général largement l'écho), alors qu'il se trouve bien souvent relégué chez nous au rang des sujets tabous.
Tout juste bon à diaboliser la bestialité des indigènes de nos anciennes colonies.
Voilà donc Stephen Sondheim (et Tim Burton) qui me font mentir avec cette révision moderne et gothique de Soleil Vert.
À voir le samedi pour pouvoir éviter le rasage le dimanche matin (et le fast-food aussi par la même occasion).
Pour celles et ceux qui aiment se faire raser gratis.
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