Après Benjamin Button, voici une autre belle histoire racontée de main de maître au cinéma.
Le maître, c'est LE grand Clint Eastwood.
L'histoire, c'est Gran Torino, non pas celle d'un jeu vidéo, mais celle de la voiture de Clint Eastwood, automobile mythique sortie des usines Ford en 1972.
Clint campe ici Walt Kowalski, un vieux retraité, réac, bougon, aigri, veuf de fraîche date, ronchon, raciste, old school, vétéran de la guerre de Corée, qui entend bien briquer sa bagnole en paix et picoler ses canettes de bières sur sa véranda avec son chien sans qu'on vienne marcher sur ses plates-bandes et sa pelouse.
Malheureusement c'est l'un des rares blancs qui s'inscrustent encore dans ce quartier envahi par les immigrés de tout bord, mexicains ou asiatiques.
Les nouveaux voisins de Walt sont justement des Hmongs (de ceux qui ont fuit Laos après la déconfiture US au Vietnam).Au début du film, l'ami Clint en fait même presqu'un peu trop dans le registre vieux con.
Mais bien vite le film bascule dans une fable sociale aux dialogues qui font mouche : l'indécrottable raciste se pique au jeu avec la fille de ses voisins, une jeune asiatique qui ne manque pas de répartie, et son jeune frère trop timide que les gangs du quartier voudraient bien embrigader.
De cette histoire plutôt facile et convenue, Clint Eastwood tire finalement un film superbe et plein de finesse sur nos sociétés multi-culturelles d'aujourd'hui, dresse quelques savoureux portraits et accumule les scènes qu'on aurait envie de voir et revoir : la communauté Hmong reconnaissante accumule sur le perron de Walt les offrandes dont il ne sait que faire, Walt rend visite à son ami le coiffeur (un sale con de Rital) avec lequel il rivalise de grossièretés viriles pour faire l'éducation du jeune frère, Walt accepte une invitation au "barbecue" de ces voisins Hmongs et y découvre qu'il y a autre chose que le boeuf dans la vie (les vieilles chinoises lui donnent presque la becquée), Walt se rend au dispensaire et découvre que les mulsumans indiens et les chinois ont remplacé les bons vieux docteurs, ...
Si le creuset américain avait réussi à fusionner une première fois (je cite :) ces cons de ritals et ces ivrognes de polacks avec ces pédés d'irlandais, il n'en va plus de même aujourd'hui avec les niaquoués ou les portos.
On s'étonnera juste de l'absence des blacks dans ce kaléïdoscope américain.
Mais le propos de Clint Eastwood s'avère plus fin que prévu, plus humain que racial (en clair : il s'entend mieux avec les enfants de ses voisins Hmongs qu'avec ses propres fils, pourtant américains pur sang).
La rivalité entre le vieux Walt et la grand-mère Hmong, chacun campant sur sa véranda, est toute en finesse.
La salle (comble) ne s'y trompe pas qui applaudit pendant le générique de fin.
Pour celles et ceux qui aiment les étrangers et les belles voitures.
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