À 37 ans, la nouvelle reine du polar suédois s'est déjà taillé un sacré succès dans les traces de Henning Mankell ou de Stieg Larsson.
Disons le tout de suite, ce n'est pas de la grande littérature.
On s'était d'ailleurs tenu jusqu'ici, prudemment à l'écart de ces couvertures convenues, craignant une tromperie au poisson nordique avec un emballage prometteur qui aurait pu receler de l'élevage ou de la conserve.
Mais non, l'importation est honnête et finalement on trouve là une écriture plutôt simple et sympa, sans prise de tête, idéale pour une gentille remise en route de neurones paresseux après les vacances.
Camilla Läckberg, c'est beaucoup moins bien que la prose du maître Mankell mais c'est aussi beaucoup mieux que le racolage complaisant de Larsson.
On découvre ici plutôt une voisine transatlantique de Patricia Cornwell.
Avec d'ailleurs le même côté prolixe dont on se lassera vite.
La série de Camilla Läckberg(1) met en scène une écrivaine (Erica) et un flic (Patrik).
Au fil des épisodes leur romance se développe (flirt, bébé, mariage, ...) de manière très conventionnelle mais toujours agréable à suivre.
Et les voici qui enquêtent finalement à deux sur quelques mauvais crimes survenus à Fjällbacka, une petite bourgade de la côte ouest suédoise(2) d'où est native Camilla Läckberg. Un lieu de villégiature un peu bourgeois(3) et jusqu'ici bien tranquille, avant que l'auteure ne se mette à y découvrir des cadavres.
Le premier de la série (La princesse des glaces) est plutôt sympa : crime pas tout à fait ordinaire, histoires de familles aux secrets cachés, couvercle de silence bourgeois sur la marmite du passé, ...
Il savait que le processus avait démarré au moment même où Alex avait été retrouvée morte dans sa baignoire. Il avait compris que la police allait fouiller, retourner tous les cailloux et exposer au grand jour tout ce qui grouillait en dessous.
Tout le monde finit par avoir une raison ou une autre d'être l'assassin. C'était un peu la recette d'Agatha Christie, réchauffée ici avec une sauce à la confiture d'airelles.
Le suivant (Le prédicateur) est plus convenu : crimes horribles, serial killer, ... on est en terrain connu même si la recette est toujours accommodée par Camilla Läckberg (histoires de famille, secrets du passé, ...).
Il se laissa tomber sur la chaise de bureau et lança un regard muet à sa femme. Leurs yeux exprimèrent une compréhension mutuelle. De vieux ossements étaient littéralement remontés à la surface, et ils savaient tous les deux ce que cela impliquait.
Quelques personnages secondaires se développent au fil des épisodes, comme la soeur d'Erica dont on suit les déboires matrimoniaux (un peu lassante la frangine, il faudra attendre le 3° épisode pour qu'elle se décide enfin) ou encore le commissaire Mellberg - le patron de Patrik - dont le portrait (très savoureux le portrait) est plutôt salé :
— Tu as remarqué quelque chose d’anormal avec Mellberg ces temps-ci ? demanda Patrik pour commencer.
— À part le fait qu’il ne se plaint plus, ne critique plus, qu’il sourit tout le temps, qu’il a perdu du poids et qu’il a abandonné ses vêtements des années 1980 pour passer aux années 1990 – rien, répondit Martin avec un sourire qui souligna l’ironie de ses paroles.
— C’est louche, tout ça.
On profite de cette lecture facile pour mieux connaître la vie quotidienne de nos voisins suédois qui, ça se confirme après Leif GW Persson, semblent bien être les plus américains des européens.
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(1) - une série télévisée est d'ailleurs en cours de tournage tout là-haut
(2) - et oui, encore un aspect de notre ignorance de nos voisins suédois : il y a une côte ouest en Suède, au sud de la Norvège, au nord de Göteborg, une région de pêcheurs, de maisons colorées et d'îlots déserts, sympa ... l'été.
(3) - Ingrid Bergman y venait en vacances lorsqu'elle était enfant
Pour celles et ceux qui aiment les polars suédois.
C'est évidemment Actes Sud (Babel Noir) qui édite ces ouvrages traduits du suédois par Lena Grumbach et Marc de Gouvenain et dont le premier (La princesse des glaces) est paru en 2004 en VO.