Ce week-end nous sommes montés au Paradis.
C'est le nom de la troisième petite salle du Lucernaire, au-dessus du théâtre Noir, au-dessus du théâtre Rouge, tout en haut des escaliers en colimaçon, dans les combles de l'immeuble de la rue Notre-Dame des Champs.
Pour y voir Nunzio, un texte de l'italien Spiro Scimone, une pièce dont on avait lu le plus grand bien, au point que certains citaient même Beckett ou Steinbeck.
Las, le texte de Spiro Scimone n'est quand même pas tout à fait à la hauteur de ces (trop) illustres références.
Reste que les deux acteurs qui portent ce texte, Christian Abart et Christian Lucas, sont formidables (et dans cette toute petite salle ils ne sont qu'à trois ou quatre mètres de nous ...).
On est en Italie. Christian Lucas est Nunzio, un grand type un peu simplet qui tourne en rond en attendant, non pas Godot, mais son pote Pino. Arrive Pino : mauvais garçon(1), un peu coincé, un brin obsessionnel.
Tout deux partagent une même solitude et les mêmes rêves inaccessibles : les plages de sable blanc et propre du Brésil ou d'Australie là où, je cite, les femmes ont le maillot de bain qui passe dans le cul.
Tout se joue sur la relation et l'amitié entre ces deux meurtris de la vie (l'un à cause d'un cerveau trop léger, l'autre à cause d'un père à la main trop lourde). Mais le texte mériterait d'être plus incisif, les personnages plus à vif.
Reste, on l'a dit, deux acteurs formidables et étonnants de maîtrise : la scène de beuverie où ils se murgent tous deux consciencieusement est un modèle du genre alors qu'elle pourrait justement se prêter à tous les excès et débordements.
Et puis lorsque Pino se lâche (en cachette de Nunzio bien sûr) pour danser la rumba et fredonner des airs brésiliens, on touche à des moments de rare poésie (salués par le petit public).
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(1) : devinette : je suis italien, peut-être sicilien. Lorsqu'une mission m'est confiée, je reçois un billet d'avion (par exemple pour le Brésil), une grosse somme d'argent (la motié tout de suite, le reste une fois le travail accompli) et une photo (par exemple d'un brésilien). Qui suis-je ?
Pour celles et ceux qui aiment les pâtes à la tomate.
Lise en parle, Camille également. Dépêchez-vous, c'est jusqu'au 11 septembre au Lucernaire.