23 janvier 2008
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L'apprenti-sorcier.
Voilà bien un drôle de film que La guerre selon Charlie Wilson qui entend traiter d'un sujet grave (la guerre en Afghanistan) sur le ton de la comédie hollywoodienne.
Le mélange est étrange mais pas dénué de saveur, d'autant qu'il relate l'Histoire vraie et met en scène des personnages réels.
Charlie Wilson (Tom Hanks) est un petit sénateur texan porté sur le whisky et les jolies femmes (il «dispose» d'une nuée de secrétaires et d'assistantes toutes plus sexy les unes que les autres, ce qui nous vaut quelques scènes amusantes dans le style Charlie et ses drôles de dames ... !).
Charlie entraîne avec lui quelques déçus de la guerre froide dans une croisade pour raviver les braises de la lutte anti-communiste et fournir des armes aux rebelles afghans.
Pour que leur intitiative reste discrète, les américains essaient tout d'abord d'acheter des armes soviétiques aux égyptiens, aux israëliens, aux pakistanais, ... ce qui nous vaut quelques moments mémorables de négociation géo-politique où l'humour de Tom Hanks et du réalisateur Mike Nichols fait jeu égal avec la leçon d'Histoire. C'est savoureux.
Mais ces armes ne suffisent pas aux moudjahidin pour dégommer les hélicos russes dans leurs montagnes et il faut donc augmenter les crédits pour leur acheminer les fameux Stinger.
On connait la suite : les russes feront retraite, les américains se désintéresseront de l'Afghanistan, les talibans occuperont le terrain libéré, Ben Laden (qui était sur place) finira par créer Al Qaïda et préparera l'attentat du 11 septembre.
Comme le suggère le générique du début du film (l'ombre d'un moudjahidin se lève, armée d'un lance-roquette et ... se retourne vers la salle pour nous tirer dessus en pleine face), l'apprenti-sorcier américain a voulu jouer avec le feu et l'arroseur a été arrosé (la fable du maître zen est d'ailleurs citée dans le film).
La leçon est connue mais il n'est jamais inutile de la rappeler, ne serait-ce qu'à ceux qui étaient trop jeunes pour suivre ces événements ou à ceux qui les ont suivis de trop loin : ces événements qui nous ont fait basculer de la guerre froide finissante à la guerre terroriste moderne.
Mais Mike Nichols n'est pas aussi sérieux que Ken Loach et au chapitre de la comédie on notera la présence de Julia Roberts en riche héritière texane partie en croisade armée d'un crucifix (mais n'hésitant pas à user de ses charmes pour rallier les indécis à la noble cause divine) et surtout Philip Seymour Hoffman (déjà apprécié dans 7h58 et Truman Capote) méconnaisable en ringard de la CIA qui rêve de vengeance (on va tuer du russe !).
Relevons également cette capacité des américains à exorciser au cinéma leurs pires démons avec la vague actuelle des films sur les guerres du Proche-Orient : Lions et agneaux (l'Afghanistan, déjà) et surtout La vallée d'Elah (l'Irak).
Et pour bientôt (encore sur l'Irak) : Redacted de Brian de Palma en février et Grace is gone de James Strouse en avril.
Pour celles et ceux qui aiment les leçons d'histoire contemporaine.
L'avis plus «critique» de Cluny.