Ah : Lola, voici encore un titre(1) qui, en français, pourrait en faire fuir plus d'un.
Mais les deux héroïnes de Lola n'ont rien de Lolitas : Lola signifie Mamie, Grand-Mère, en tagalog (non, je ne suis pas dyslexique : le tagalog est la langue des Philippines).
Brillante Mendoza a tourné son film à Manille en pleine saison des pluies là où les habitants de la banlieue inondée de Malabon, quartier d'Ilog, vivent les pieds dans l'eau les trois quarts de l'année(2) ...
Lola Sepa cherche de l'argent pour enterrer dignement son petit-fils, poignardé pour son portable.
Loal Puring cherche de l'argent pour sortir son petit-fils de la prison où il est incarcéré après avoir poignardé ... le petit-fils de Lola Sepa.
Leur quête mène les deux Lolas de voisin en cousin ou en bureau d'aide sociale ...rien ne les arrête, ni l'adversité, ni l'administration, ni la maladie, ni les rhumatismes, ni le vent, ni la pluie ... les Lolas des Philippines sont capables d'allumer quelques cierges en plein orage sous un vieux parapluie retourné (les premières images du film qui donnent le ton).
C'est un véritable documentaire sur la vie des petites gens de Manille(3) aux prénoms anglo-saxons ronflants.
L'argent est au coeur du film, au coeur de chaque image ou presque : les trop rares pesos passent de main en main, sans cesse ...
Trop documentaire selon MAM : manque de rythme "filmique" ...
BMR, plus contemplatif ce soir-là, s'est laissé porté au fil des canaux et des rues par cette histoire avare de mots et d'effets, ni drôle, ni vraiment triste.
Un beau livre d'images très très dépaysant, un voyage dans ce pays où chacun est plein de respect et d'attention pour les ainé(e)s et les Lolas.
Un film très féminin également où les hommes semblent au mieux partis travailler au loin et au pire guère capables de grand chose : les Lolas portent seules la charge des filles et des petits-enfants.
Quelques scènes magiques et presque surréalistes (un peu rares, il est vrai) comme la procession funéraire dans les faubourgs inondés ou encore la chasse aux canards dans les rizières ...
Et bien sûr, deux Lolas qui valent le voyage à elles seules : Lola Sepa, c'est Anita Linda et Rustica Carpio est Lola Puring.
___________
(1) : après La révélation par exemple.
(2) : un quartier où c'est la fête quand on peut attraper quelques poissons dans son sous-sol ... qui sait, peut-être un aperçu de ce qui nous attend après deux ou trois crises financières et réchauffements planétaires ?
(3) : le film est parait-il tourné avec les gens du cru comme figurants, jusqu'aux vrais prisonniers dans la prison ...
Pour celles et ceux qui aiment les aînées.