Ce livre nous avait été proposé dans le cadre de l'opération Masse Critique par l'équipe de Babelio et les éditions des Deux Terres.
On a bien entendu saisi au vol (d'avion) l'occasion de retourner en Afrique du Sud après y avoir déjà été invités par Henning Mankell ou Deon Meyer.
Cette fois le voyage se fera en compagnie de Malla Nunn : elle est originaire du Swaziland et vit désormais en Australie.
Très agréable découverte que cette première (mais pas dernière) enquête de l'inspecteur Cooper.
Même si on peut regretter le titre français(1) passe partout, un peu racoleur, un peu hall de gare, sachant tout de même que le titre en VO ne valait guère mieux : A beautiful place to die.
Nous voici donc au début des années 50 dans un trou perdu du veldt, tout près de la frontière avec le Mozambique. À cette époque la doctrine de l'apartheid est en plein essor et fleurit sur les cendres du nazisme. Le Nasionale Party (tiens, y'a encore de l'écho ?) et les Afrikaaners sont au mieux de leur forme. Sur fond de guerre froide, la Security Branch fait régner la terreur blanche, pourchassant tout ce qui est rouge ou noir.
Et puis ce jour-là ... dans ce trou perdu de la brousse, on découvre un cadavre au bord du fleuve.
Un cadavre de blanc. Un cadavre de flic. Un flic blanc qui descendait d'une noble lignée de Boers purs et durs.
Alors la Security Branch dépêche sa meilleure escouade de gros bras, avides d'épingler, que dis-je, de pendre un pauvre black à tendance rouge.On trouvera sûrement tout ce qu'il faut sur place : le bonhomme, les aveux et la corde.
Tandis que la police de Johannesburg envoie l'un de ses meilleurs inspecteurs, du genre qui veut attraper le vrai coupable. Pfff !
Le volet polar est sans reproche : une enquête difficile, des luttes de pouvoir, de lourds secrets qui devront remonter à la surface, de sombres histoires de famille et de village, ... tout y est.
Mais l'intérêt de ce bouquin est ailleurs : dans la description de cette Afrique qui n'arrive pas à dépasser (et on sait qu'il lui faudra encore de nombreuses années ...) les clivages entre l'arrogance des blancs d'un côté, la fierté des noirs de l'autre, et la peur des métis perdus au milieu.
On a déjà évoqué plus haut les cendres du nazisme : l'inspecteur Cooper a été traumatisé par on ne sait trop quels événements de la guerre et on retrouve même au centre de cette intrigue policière, un ancien toubib juif qui a subi on ne sait trop quelles horreurs. Le décor est planté et ne laisse planer aucun doute sur la filiation de la doctrine du Nasionale Party qui tente d'éradiquer toute relation “inter-raciale”.
[...] D'après les nouvelles lois raciales, tout était blanc ou noir. Le gris avait cessé d'exister.
Mais voilà ... on est en Afrique. Paysages grandioses, chaleur moite, vigueur animale, tout cela exacerbe les désirs de pouvoir, de violence et de sexe.
Manifestement, selon Malla Nunn, la suprématie blanche n'avait aucune chance de résister bien longtemps à la pression contenue. La marmite bouillonne, quelque soit la couleur des légumes qui y mijotent.
[...] Les forces de la nature sont plus puissantes que les lois faites par les hommes.
Et l'on découvrira au fil de l'enquête que tout n'est pas noir ou blanc. Qu'il y a beaucoup, beaucoup de gris, de quelque côté que l'on se tourne : la place faite aux métis dans cette histoire est très instructive et dévoile tout un pan méconnu de cette Afrique du Sud dont avait une photo uniquement en noir et blanc.
Vivement la prochaine enquête de l'inspecteur Cooper.
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(1) : mais un titre qui, finalement, est plutôt fidèle au contenu du bouquin.
Pour celles et ceux qui aiment l'Afrique. Noire, blanche ou chocolat.
Les éditions des Deux Terres éditent ces 390 pages qui datent de 2008 en VO et qui sont traduites de l'anglais par Anne Rabinovitch.
Pour Kathel aussi, ce fut une agréable surprise.