Andy, dis moi oui
Andy Warhol expose ses portraits au Grand Palais.
On a été enchanté de voir tant de ses sérigraphies réunies en ce lieu, exposées comme il se doit, dans de grands espaces, de grands volumes.
Andy Warhol est un artiste aisément accessible : il se disait lui-même artiste commercial, simple miroir du monde.
Bien sûr on sait que ces répétitions sérigraphiées singeaient la production en masse de la société de consommation émergente en ces années 60.
Bien sûr on sait qu'il singeait l'art commercial faisant lui-même de sa propre production une source de revenus substantiels (on s'arrachait ses portraits à prix d'or) et de son atelier une factory.
Au-delà de cette légende, l'expo du Grand Palais nous fait découvrir un artiste passé maître dans l'art du portrait.
Jouant de cette grossière technique sérigraphique il réussit à tirer la substantifique moelle des visages maquillés : deux yeux, deux lèvres, une chevelure, et nous reconnaissons immédiatement la star de la mode, du show-biz, de la politique, ...
Car Andy Warhol se joue aussi de nos icônes : il sait que nous savons qui est ici portraituré.
Et il explore, il expose, le "Grand monde", c'est le titre de l'expo.
On était prêt à payer le prix fort pour se faire tirer le portrait et bien au-delà du monde du show-biz, tout "le Monde" y est passé, le Grand monde des affaires (Giovanni Agnelli ou la baronne Von Thyssen, ...), le Grand monde de l'art (Roy Lichtenstein, Rauschenberg, ...), le Grand monde de la mode (Sonia Rykiel, Armani, ...), le Grand monde de la politique (le Shah d'Iran, Mao, ...), le Grand monde tout court (Diana, Caroline, ...), ...
C'est un portrait de notre société que vise l'artiste comme en témoigne cette première salle où sont réunis très symboliquement les icônes éternelles (Mona Lisa, Jacky, Marylin), l'américain moyen (l'homme inconnu) et un repris de justice (portrait anthropomorphique).
Au fil de ces grandes salles et de ces nombreux portraits, on est peu à peu touché par l'humanité que cachent ces jeux de couleurs, cette quête de la répétition quantitative, comme si Andy Warhol cherchait ce qu'il y a de vrai derrière les regards de nos stars, ce qui se cache sous la surface, sous la surface des visages et la surface des peintures ou des photos, comme en témoignent ces "crânes" qu'il surimprime, lui qui ... se sera fait refaire le nez.
Lui qui aura réussi à faire d'un épi de cheveux teints en blanc une nouvelle icône : la sienne ! Bravo l'artiste !
L'un des derniers portraits de l'expo est celui de Madame Bilotti et sa fille : s'il n'est pas l'un des plus beaux, ni l'un des spectaculaires, c'est peut-être l'un des plus justes.
Au fil d'étoiles, notre teenageuse à peine sortie de sa période Guerre froide, a flashé pour Willy Brandt.
MAM, elle, aura fantasmé sur Gunther Sachs.
Et BMR est bien évidemment resté baba devant Debbie Harry, la chanteuse de Blondie.
Pour celles et ceux qui aiment les regards.
C'est jusqu'au 13 juillet au Grand Palais.
C'est aussi dans la Boîte à sorties.